La librairie Les Vagues fête sa première année d'existence à Nantes. Amandine, l'une des deux personnes derrière le projet, nous en parle.
En juin 2024, la librairie queer Les Vagues a ouvert à Nantes. J'y suis régulièrement passé·e depuis, et j'apprécie beaucoup le lieu. Pour l'anniversaire de son ouverture, Amandine, la libraire a accepté de répondre à mes questions.
Pour commencer, est-ce que tu peux présenter les personnes derrière la libraire ?
Derrière cette librairie se cachent deux ami·es qui ne se connaissaient pas mais qui se sont rencontré·es autour de ce projet : Max et Amandine. J'ai rencontré Max il y a quelques années avec l'envie d'ouvrir une librairie queer, lui a gardé son poste actuel et vient à la librairie au moment des rencontres tout en occupant des tâches de coulisses (compta, veille, etc.) essentielles au fonctionnement de notre lieu ; et sinon c'est moi, Amandine, que vous risquez de croiser en venant aux Vagues !
Comment est-ce que vous avez eu l'idée d'ouvrir une librairie ?
Chacun·e de notre côté nous nourrissions l'idée d'ouvrir une librairie queer à Nantes : par amour de la littérature, par envie d'offrir un espace à notre communauté et par volonté de créer un commerce militant. Après des parcours très différents, c'est finalement cette idée commune qui nous a permis de nous rencontrer et de mener à bien ce projet.
Comment ça s'est passé pour la réalisation du projet ? C'était quoi vos objectifs ?
Avant l'ouverture de ce lieu il a fallu passer par de très nombreuses étapes : déjà voir si nos envies coïncidaient, se lancer dans une telle aventure sans se connaître demande de prendre la mesure de l'engagement qui va nous lier ! Ensuite voir l'idée est réaliste d'un point de vue économique : aurons-nous la clientèle que nous cherchons ? Une librairie queer est-elle attendue ? La réponse était heureusement oui et oui ! Et puis est arrivée la phase de recherche d'un local et de sous qui a été plus pénible qu'imaginé. Le prêt accordé, la campagne de financement participatif terminée (avec 11000€ récolté, encore merci <3) et le local trouvé, il ne nous restait plus qu'à remplir cet espace de livres et de queerness ! On a retroussé nos manches et pu compter là encore sur notre commu pour venir poncer, peindre, poser du parquet, monter des meubles et faire de ce local un véritable cocon pour nous. En parallèle nous avons poursuivi notre commande d'implantation pour atteindre 3000 références et fait les démarches nécessaires pour avoir le droit de commercialiser des livres.
Ça va faire un an que la librairie est ouverte. Quel a été l'accueil du public ?
L'accueil de notre public a été largement à la hauteur de nos attentes. Nous avons reçu beaucoup de soutien avant le montage du projet, pendant et puis finalement dès l'ouverture. Notre clientèle est notre moteur, nous nous sommes trouvé·es. C'est une joie immense pour moi d'aller au travail le matin en pensant que je vais être en contact avec la communauté queer et ses allié·es. On fait tout maintenant pour qu'à notre tour, nous soyons à la hauteur des personnes qui franchissent la porte des Vagues.
Je suis l'activité de la librairie via Instagram, et je vois qu'il y a beaucoup de rencontres, d'ateliers… C'est important pour vous de ne pas vous contenter de vendre des livres ?
Vendre des livres est évidemment la priorité. Bien que notre démarche soit clairement politique et militante, nous n'en restons pas moins un commerce (la librairie étant le commerce le moins rentable de France pour info...) et notre viabilité dépend des livres vendus. Donc oui, nous voulons vendre des livres mais pas que ! Nous voulons aussi proposer un espace de vie, un lieu de rencontres, en endroit à soi, pour soi, où la littérature ne se vit pas qu'à travers l'achat de livres mais aussi par les échanges avec les auteurices, par des ateliers animés par des artistes.
En tant que libraire, comment est-ce que vous faites pour choisir les livres que vous proposez dans les rayons ?
La sélection de nos livres est assez ordinaire : nous choisissons des livres qui rentrent dans notre perspective queer intersectionnelle (féministe et décoloniale donc). Nous proposons des livres que nous avons lus et aimés, des livres écrits par des personnes dont nous connaissons déjà le travail. Cela se fait aussi avec le catalogue des diffuseurs, des maisons d'édition, etc.
On vit dans un monde où il y a beaucoup d'autres moyens de se renseigner et de se divertir que les livres, je pense à Internet, les séries, les jeux vidéo… Pour toi, quelle est la place des livres ?
Le livre occupe la place qu'on a envie de lui accorder ! Pour certain·es c'est un nécessité vitale, pour d'autres un loisir, il y a des personnes qui ne lisent pas et d'autres qui ne peuvent s'en passer. Je crois que, quoi qu'il arrive, il faut déculpabiliser son rapport à la lecture et peut-être aussi désacraliser le livre. Mais si vous êtes effrayé·es par la lecture, n'hésitez pas à franchir la porte, je prendrai grand plaisir à vous faire des propositions qui vous donneront envie de tenter l'aventure !
Pour conclure, est-ce que tu as un mot de fin, ou des recommandations de lecture ?
On est en juin, le mois de nos fiertés, alors continuons d'exister, d'être visibles, de créer des lieux, de prendre de la place, de lire des livres queers, d'écrire des textes queers et, si possible, de venir aux Vagues !
Dans la nuit du 8 au 9 mai, les vitrines de la librairie ont été détruites. La communauté s'est immédiatement mobilisée pour soutenir les Vagues, en venant à la boutique, en achetant des livres, en décorant la vitrine, en participant à la cagnotte ouverte pour pouvoir mettre en place une solution plus sécurisée. Plusieurs librairies de Nantes ont également affiché leur soutien.